St Nicolas Enghien - Orgue Detlef Kleuker

 

Le « nouvel » orgue d'Enghien provient de la Marienkirche de Bielefeld-Neustädt, l'église protestante principale de cette ville de Rhénanie-du-Nord-Wesphalie. Datant de 1970 et doté de 47 jeux pour trois claviers et pédalier, cet instrument passe pour être le plus grand (1) réalisé par le facteur d'orgues DETLEF-KLEUKER dont l'atelier se trouvait à seulement cinq kilomètres de cet édifice. Nul doute que cet orgue dut donc lui faire office de carte de visite.

KLEUKER est souvent associé au nom de GUILLOU (18.4.1930 - Angers (France) -  26.1.2019 - Paris), par référence aux instruments réalisés selon ses principes, ceux de :

Mais celui d’Enghien est d’une structure bien plus conventionnelle et assez représentatif des « trois claviers » d’une quarantaine de jeux que construisit KLEUKER entre 1963 et 1972 (Hanovre, Berlin-Schöneberg, Kiel, Neuss, Neuwied, Berlin-Moabit, Saarbrücken, Munich, Hamburg-Lokstedt, Hamburg-Altona), combinant des Hauptwerk et Brustwerk (ou Positif-pectoral) (2) librement inspirés de l’orgue allemand nordique, de même que le clavier de pédale très développé, avec un Schwellwerk tendant vers le Récit expressif néoclassique.

Dans le cas présent, le Schwellwerk est implanté en haut du soubassement, de part et d’autre du
Brustwerk. Vu la hauteur de ce soubassement, ce Brustwerk se trouve à une distance suffisante de l’organiste pour ne pas l’assourdir, défaut de nombreux Brustwerk, tout en étant encore suffisamment proche pour qui veut l’utiliser en musique de chambre. Vu la présence d’un accouplement Sw/Bw, il peut aussi servir de plan de puissance sonore intermédiaire entre le Hw et le Sw, d’autant plus qu’on a eu la bonne idée de le faire correspondre au deuxième clavier. À l’étage supérieur du buffet, les plate-faces sont garnies de tuyaux appartenant au Hauptwerk qui occupe toute la partie centrale, tandis que les tuyaux postés en avant des tourelles font partie de la pédale qui est logée dans les tourelles extérieures.

 

C’est la MANUFACTURE D’ORGUES SCHUMACHER d’Eupen qui fut chargée de procéder au démontage de l’instrument à Bielefeld – il débuta le 29 août 2016 – puis à son installation à Enghien.

À noter que lors de la construction, certains éléments de la charpente métallique durent apparemment être soudés sur place, mais pour le remontage à Enghien, on a privilégié l’assemblage boulonné. De même, quelques éléments du buffet qui avaient été collés sur place ont dû être sciés pour ensuite être réassemblés de manière plus traditionnelle.

Mais avant d’être remonté à Enghien, l’instrument a été entièrement nettoyé et révisé en atelier, avec pour principales opérations :

  • renouvellement des éléments usés par le temps, tels que les peaux des réservoirs-régulateurs intégrés aux sommiers ou celles des soupapes ;
  • révision et renouvellement au niveau du tirage électrique des jeux afin de le mettre aux normes de sécurité actuelles, et pour doter aussi l’instrument des possibilités d’un combinateur moderne, ce qui a entraîné une certaine réorganisation des commandes à la console, tant au niveau des pistons aux pieds et qu’à celui des poussoirs aux mains ;
  • la tuyauterie étant dans l’ensemble de très belle qualité, seuls les tuyaux de façade et les grands tuyaux à bouche intérieurs ont eu besoin de soins tels que redressage et remplacement de pointes de pieds affaissées. Les grands tuyaux de façade ont été suspendus à une structure métallique pour éviter tout affaissement ultérieur.

 

Pour ce qui de l’harmonisation, laissons la parole à Guido SCHUMACHER : « Comme cet instrument constitue un témoignage important de la facture de Kleuker et que, d’une part le volume de l’église de Bielefeld est très proche de celui d’Enghien, et d’autre part qu’il est situé quasiment au même endroit dans l’église, l’harmonisation d’origine a été respectée et seulement égalisée en gardant l’équilibre des plans sonores, de même que la couleur des différents jeux. 

 

Notes :

(1) Cet orgue est plusieurs fois mentionné comme étant le plus grand de KLEUKER, mais c’est oublier celui de la Gedächtniskirche der Protestation à Speyer, datant de 1979, de VP/95, même s’il reprend des jeux et la façade de l’instrument précédent.
(2) Dans certains des KLEUKER cités, le Brustwerk est remplacé par un Ruckpositiv.
(3) G. SCHUMACHER, op. cit.

Sources : Luc de Vos - Revue L'Organiste - n° 199 - 2018/3 - pp. 128-131. D’après : Detlef Kleuker, sur : Wikipédia.de et Wikipédia.fr - Guido SCHUMACHER, L’orgue monumental Detlef Kleuker, http://grandorguekleukerenghien.eklablog.com-Visite le 20.11.2018.

Photos : Luc De Vos - Revue L'Organiste - n° 199 - 2018/3 - pp. 128-131.